
On se souvient du rendez-vous en partie manqué, il y a toute juste un an, entre la communauté universitaire de Louvain-la-Neuve et le pape François. La première avait interpelé le second : « Laudato si’ porte les germes d’une réflexion prometteuse pour l’inclusion de toutes et de tous. Mais comme souvent dans l’histoire de l’Église, les femmes ont été invisibilisées ». La réponse de François était tombée à plat : « La femme est accueil fécond, soin, dévouement vital ».
Si le défunt pape avait eu entre les mains l’ouvrage que voici, il est permis de penser que sa réponse aurait eu d’autres harmoniques. Ce livre nous plonge dans un courant de la pensée chrétienne extrêmement fécond mais peu connu dans le monde francophone : l’écoféminisme chrétien. Une anthologie de textes de théologiennes qui « revisitent la tradition chrétienne à partir des critiques féministes et écologiques qui lui sont adressées » et « proposent de nouvelles interprétations et ouvrent des chemins de traverse inspirants et mobilisateurs », à l’heure d’affronter les défis écologiques et sociaux.
Les deux auteur.e.s de ce recueil, Charlotte Luyckx et Michel Maxime Egger, elle comme écophilosophe, lui comme écothéologien, nous gratifient d’une riche introduction qui s’ouvre avec un parcours des différentes ramifications de la « nébuleuse écoféministe » et permet d’identifier la spécificité de la branche chrétienne qui marche sur une « ligne de crête » entre déni des problèmes de la domination masculine et réduction de la tradition chrétienne à ses seuls défauts.
Cette introduction propose aussi une synthèse éclairante de différentes thématiques comme la mise en question d’une représentation masculine et exagérément transcendante de Dieu ou une nouvelle compréhension moins anthropocentrique de l’être humain et de la création. Les chapitres sont distribués selon ces différentes thématiques, le dernier étant moins une conclusion qu’une fenêtre sur différents chantiers que ce mouvement a ouverts : le rapport à la sexualité, la liturgie, la spiritualité militante, la justice sociale, etc.
Même si la familiarité avec le vocabulaire théologique en facilitera la lecture, ce recueil reste accessible. Un livre qui donne faim ! Faim de poursuivre avec ces théologiennes le chemin d’une réappropriation et d’une refondation de la tradition chrétienne.
Christophe Renders