Le 06 mai 2020

#avecVous [épisode 11] – Alexandra engagée dans JaiJagat

Vous avez déjà entendu parler de la marche mondiale Jai Jagat ? Initiée par Rajagopal PV, un disciple de l’action non violente de Gandhi, c’est une marche qui a commencé le 2 octobre 2019 (jour du 150ème anniversaire de la naissance du Mahatma Gandhi), et avait pour objectif d’atteindre Genève le 25 septembre 2020, journée internationale de la paix. Jai Jagat signifie « victoire d’un monde inclusif et pacifique » où personne n’est laissé pour compte. Véritable Caravane de la paix, les marcheurs devaient parcourir plus de 10.000km, et passer par 17 pays. Hélas… la pandémie du Covid-19 est passée par là et a mis fin à cette belle initiative.

Si la marche a dû être interrompue, son message et son ambition sont plus que jamais d’actualité. Car Jai Jagat est bien plus qu’une marche… C’est une véritable campagne de paix et de justice, à l’origine de plusieurs événements dans divers pays depuis 2017, visant à encourager la non-violence comme action sociale, mais aussi comme principe économique élémentaire (voir www.jaijagat.be/jeunes). De quoi nourrir la réflexion pour l’après-crise sanitaire.

Ici en Belgique, une marche devait partir le 1er juillet 2020. Une délégation de jeunes devait se rendre à Genève également, préparés et envoyés comme ambassadeurs du projet Jai Jagat jeunes. Ce projet jeunes, porté par plus de 150 personnes d’horizons divers, préparait notamment une marche de trois jours qui devait avoir lieu fin mars. Elle non plus n’a pu avoir lieu.

Alexandra Boux est une de ces personnes qui se sont engagées avec beaucoup de cœur pour ce projet jeunes. Comment vit-elle le confinement ? A quels défis les porteurs du projet jeunes sont-ils confrontés ? Qu’est-ce qui l’aide à garder l’espoir ? Alexandra nous partage son témoignage. Découvrons comment sa foi chrétienne l’aide à donner du sens à la situation et à aller de l’avant.

Claire Brandeleer

Je m’appelle Alexandra Boux. Mariée, maman et professeur de religion depuis une vingtaine d’années dans la région de Bruxelles-Bw, j’ai rejoint l’an passé l’équipe de Pastorale scolaire. C’est à ce titre que nous avons été contactés par deux professeurs qui cherchaient un appui pour leur marche appelée ‘Jai Jagat’ – ce qui signifie en hindi : Victoire d’un monde inclusif, d’un monde pour tous.

En répondant à cet appel avec Catherine Jongen (de la Liaison des Pastorales des jeunes), nous ne savions pas que nous allions nous engager dans une aventure de presque 2 ans, avec la préparation d’une marche et d’un forum pour 400 jeunes venus d’écoles secondaires très diversifiées, en partenariat avec le Centre de demandeurs d’asile de la Croix-Rouge à Jambes et une bonne vingtaine d’associations.

Seulement voilà… la date prévue pour ce grand événement était le 27 mars et aucun de nous n’avait imaginé que nous serions stoppés net dans notre organisation, ni surtout que la grande marche mondiale devrait elle aussi s’arrêter et se dissoudre à mi-parcours, soit à Erevan, en Arménie.

Grande effervescence d’un an et demi, centaines de personnes mises en route, victoires, déconvenues et solutions créatives puis, soudain, … plus rien ! Grand silence. Et interrogations… Dieu, qui semblait nous avoir conduits et accompagnés pendant tout ce temps, se serait-Il à son tour retiré ? Fallait-il encore comme je me suis toujours efforcée de le faire jusqu’ici, voir Dieu parler à travers l’événement, fût-il complètement absurde et scandaleux comme une épidémie, la mort de tant de gens, l’annulation de marches pour la paix et… de tant d’autres sain(t)s projets ?

Deux amies – comme jadis les femmes au tombeau, m’ont glissé à l’oreille : l’une qu’il faut passer de la religiosité à la foi et l’autre, qu’une solution créative plus juste encore, serait sûrement à venir, qu’il nous fallait y réfléchir. « Il nous a dit de vous dire qu’il vous précéderait en Galilée »[1].  

Alors, aujourd’hui, en ce temps de confinement, c’est le temps de la latence. Du laisser pousser la graine mise au plus profond et au plus sombre de la terre. Une énergie folle, des sommes d’argent, des contacts, tant de RDV pris, tout a été enseveli. Mais la nature, qui sait si bien parfois parler des choses de Dieu, nous indique que la vie est toujours là.   

Un sympathisant gandhien à qui on demandait que ferait Kasturba (l’épouse de Gandhi) en pareille situation, a répondu : je crois qu’elle serait retournée cuisiner… Comme la marche mondiale, le projet Jeunes va devoir être remodelé. Par l’Esprit. Et il nous faut à présent nous laisser faire, nous laisser être.

« Nos chers amis Jill Carr-Harris et Rajagopal PV ont annoncé que nous annulons officiellement la marche du Jai Jagat à travers la Géorgie, les Balkans et l’Italie cette année. Il est prévu d’organiser une ou plusieurs marches européennes symboliques au mois de septembre 2020 (si la situation le permet), avec un forum prévu à Genève qui se terminera le 2 octobre. L’objectif du forum de Genève sera de remodeler le mouvement Jai Jagat à l’avenir pour en faire une réponse globale dans l’ère post-Corona »[2].

Amis, amies, plus que jamais il est temps de nous acheminer, step by step, vers la véritable Jai Jagat, la victoire d’un monde plus inclusif. Là où nous sommes. Les migrants présents en nombre dans nos villes, les jeunes, les femmes, nos anciens, les plus pauvres ou les plus fragiles de nos familles nous y invitent au quotidien. Car c’est d’une marche au long cours qu’il s’agit, plus longue qu’un seul « an et demi de préparations ». C’est de résurrection qu’il s’agit, tout de même ! Car Dieu ne parle pas toujours dans l’événement. Il en fait quelque chose. A nous d’en porter, comme les femmes, la Bonne nouvelle ! Et des ébauches créatives de réalisation…

Alexandra Boux

Notes :

  • [1] Voir notamment l’évangile de Matthieu, chapitre 26, verset 32.

    [2] Extrait de Jaijagat2020.be