Le 17 juillet 2019

Piété populaire & prosélytisme des sectes

crédit : Raphael Nogueira – Unsplash


État de la question :

La principale continuité entre le pentecôtisme et la religiosité populaire brésilienne consiste dans la croyance en Jésus, aux démons, aux miracles, au péché, aux guérisons et interventions surnaturelles, aux sortilèges, aux conceptions eschatologiques. Ressort aussi généralement le caractère laïque du pentecôtisme, qui permet au fidèle d’entrer en contact avec Dieu sans dépendre de la médiation ecclésiastique. Ces ressemblances et ces continuités entre la religiosité populaire et le pentecôtisme, me semble-t-il, facilitent l’évangélisation et la socialisation des nouveaux adeptes des églises pentecôtistes[1].  

Contexte historique de la culture religieuse

Sous le régime du Padroado[2], la foi chrétienne est l’instance de légitimation de la société coloniale. Ainsi, au niveau local, le pouvoir « patriarcal » domine, image du Dieu-Père tout-puissant, qui se traduit dans des pratiques politiques de faveur. Les classes populaires intériorisent cette domination séculaire en vivant dans la dépendance des figures du « patron » et d’autres formes de clientélismes. Dans le Brésil colonial, les communautés étaient naturellement chrétiennes, avec peu de présence sacerdotale. Les fêtes religieuses et d’autres pratiques de la foi révèlent une relative autonomie des fidèles laïcs par rapport à l’institution ecclésiale et renforcent le pouvoir « généreux » des riches, maîtres de la terre et des esclaves.

Au XIXe siècle, l’Église se renforce comme institution ecclésiale, en appliquant le Concile de Trente, par une romanisation du clergé et une cléricalisation de l’Église. Les « superstitions » populaires s’opposent à la pureté de la doctrine. Le culte des saints de la dévotion traditionnelle et populaire est remplacé par le culte des saints des missionnaires venus d’Europe. Le clergé occupe l’espace culturel et le fidèle laïc perd la dimension sociale de la foi et cesse d’être acteur religieux. Il s’agit d’un processus de « privatisation » de la foi.

La piété populaire

Comme le dit, très justement, le Document d’Aparecida, la piété populaire n’est pas une « spiritualité de masses » (261). « À différents moments de lutte quotidienne, beaucoup recourent à quelques petits signes de l’amour de Dieu : un crucifix, un rosaire, un cierge que l’on allume pour accompagner un fils dans sa maladie, un Notre Père murmuré entre des larmes, un regard profond vers une image chère de Marie, un sourire destiné au Ciel, au milieu d’une joie toute simple »[3] .

Cependant, cette piété populaire, même si elle est surtout vécue dans la sphère domestique, avec ses saints, comme Saint Benoît, n’a pas complètement disparu comme pratique religieuse publique. « Parmi les expressions de cette spiritualité, on compte : les fêtes patronales, les neuvaines, les rosaires et les chemins de croix, les processions, les danses et les cantiques du folklore religieux, l’attachement aux saints et aux anges, les vœux, les prières en famille »[4]. Il faut noter tout particulièrement la persistance de manifestations populaires et religieuses comme la Fête des Rois, et surtout les moments les plus intenses de la liturgie de la Semaine Sainte, les processions de la Rencontre et du Christ mort. Les gens simples s’identifient avec Jésus souffrant dans sa passion et dans sa mort.

Ce n’est pas sans raison que les « croyants » (Pentecôtistes, et néo-pentecôtistes) disent que les catholiques adorent un Dieu mort, alors que leur Jésus est vivant. Quand, dans une réunion préparatoire au baptême d’enfants, on demande à des parents et à des parrains qui participent peu aux célébrations et à la vie de la communauté : « Qu’est-ce que Jésus a fait pour nous ? », la réponse immédiate est : « Il a souffert et est mort pour nous. ». La foi dans la résurrection apparaît peu parce qu’il n’y a pas une expérience spirituelle de la présence vivante du Seigneur Jésus ressuscité.

La piété populaire en chiffres

Pourtant, le catholicisme populaire reste vivant si nous considérons les recensements démographiques. Malgré la diminution en termes relatifs du nombre des catholiques depuis les années septante du siècle passé et, surtout, en termes absolus, dans le dernier recensement de 2010, plus de 123 millions d’habitants se déclarent catholiques (pratiquants ou non pratiquants) pour une population de l’ordre de 190 millions (selon le recensement de 2010).

Le concept de « pratique religieuse » est assez élastique. Mais, supposons une pratique de l’ordre de 16 % des catholiques, nous aurions 20 millions de pratiquants, soit quasi 10 % de la population brésilienne. Dans le même temps, les évangéliques d’obédience pentecôtiste atteignent les 25 millions selon le même recensement de 2010. Les catholiques non pratiquants seraient plus de 100 millions.

Précédemment, le catholicisme était la culture dominante, le sens commun, il comprenait aussi les « non pratiquants », régnant sur des terrains comme ceux de la sexualité, du mariage, de la morale en général. Il y a beaucoup de groupes qui vivent la religiosité populaire comme une forme de pratique religieuse plénière, même s’ils n’ont pas et ne cherchent pas la messe dominicale. Cela se ramène à « faire ses pâques » et aux missions populaires.

Aujourd’hui, les manifestations extraordinaires de l’Église catholique attirent les foules. Par exemple, dans les pèlerinages de la sainte Croix ou de l’icône de Notre Dame, on trouve un grand nombre de jeunes qui veulent être présents et ne se sentent pas étrangers à l’Église. Peut-être s’éloignent-ils à défaut de propositions qui tiendraient compte de leurs besoins et de leur langage.

Identité religieuse

Les évangéliques mettent l’accent sur une expérience directe et immédiate de Dieu. La foi dans un Jésus spiritualisé (désincarné) attire beaucoup de gens, surtout en raison de l’attention et des réponses immédiates aux besoins de la vie. La diversité des pentecôtistes est très grande et leurs organisations sont décentralisées et autonomes. Très proches de la population, ils ouvrent une multitude de temples plus accessibles que les paroisses et les chapelles catholiques.  Ils créent des espaces et des techniques d’accueil qui font que de nombreux catholiques commencent à fréquenter le temple en relativisant la singularité de la foi catholique (« toutes les religions sont égales et ici je me sens bien »).

La différence est criante entre le nombre de prêtres et le nombre de pasteurs et de pasteures par habitant. Le modèle historique de l’Église, où la vie sacramentelle et l’évangélisation sont très centrées sur le ministère ordonné, n’est plus en état de répondre aux demandes et aux besoins des fidèles. Dans les faits, l’Église pratique davantage une pastorale de maintenance et est plutôt une « simple administration »[5], qu’une « Église en sortie »[6]. L’absence de l’Église est évidente dans les périphéries des villes et, principalement, dans les lieux de formation urbaine récente ou d’agglomération provoquée par de grands projets. De nombreux lotissements « Ma maison, ma vie » ont surgi dont l’Église est absente.

« Manque de pères » et structures ecclésiales

Un problème permanent de la vie de l’Église est le manque de prêtres. Sous l’empire (1822-1889),l’hégémonie du christianisme s’affaiblit avec les nouvelles idées provenant essentiellement de l’Europe, comme la franc-maçonnerie, l’illuminisme, le positivisme et le libéralisme qui entrèrent en conflit avec l’Église. D’où la nécessité d’un clergé bien formé, avec une importation de religieux et de religieuses pour enseigner les fidèles.

Malgré les efforts pour mettre en oeuvre le Concile Vatican II, l’Église reste encore centrée sur la personne du ministre ordonné. Il faut revoir tout le processus de formation des futurs ministres ordonnés, en repensant l’ouverture à des ministères diversifiés. Si, théologiquement, l’Eucharistie est le cœur, le centre et le fondement de l’Église, avec l’actuel modèle de prêtres, il sera impossible à la majorité des catholiques d’y avoir accès.

Face aux défis de la Nouvelle Évangélisation, les évêques observent un écart entre leur propre conscience ecclésiale, en syntonie avec l’ardeur missionnaire du Document d’Aparecida  et la conscience ecclésiale  du clergé. L’insistance sur la figure du « curé » comme administrateur d’un territoire déterminé obscurcit le caractère missionnaire de l’Église locale. Pour repenser la mission comme une Église « en sortie », les documents des évêques et du pape François sont très bons, mais dans la vie concrète on ne sort pas des vieilles structures.

La transition religieuse

En comparaison avec le recensement de 2000, le recensement démographique de 2010 met en évidence une diminution, en termes relatifs (de 73,6 % à 64,6 %) et absolus (de 125 à 123 millions), du nombre de catholiques. Parallèlement, se confirme l’accroissement de la portion de la population qui se déclare évangélique pentecôtiste (de 18 à 25 millions, soit une augmentation de 44 %). C’est dans le Nord qu’on constate la plus forte diminution des adeptes du catholicisme. Le progrès de l’occupation des Régions Centre-Ouest et Nord a été réalisé par divers segments de la mouvance pentecôtiste.

Plus surprenante est l’augmentation du nombre des « évangéliques non déterminés » qui manifeste un double processus d’individualisation et de désinstitutionalisation. C’est le groupe qui a le plus augmenté en termes relatifs (466,3 %), passant de 1,6 million en 2000 à 9,2 millions en 2010, soit un accroissement de 7,5 millions. Si on y ajoute les « autres » églises évangéliques parsemées dans le pays, on arrive à une augmentation de plus de 10 millions.

Le processus de désaffiliation institutionnelle ne signifie pas une perte de la religion mais un changement de paradigme. Le religieux était le lien qui reliait les populations autour de l’église sur la place publique. Aujourd’hui règne le paradigme du marché qui a envahi aussi le champ religieux. Sur le marché religieux on se procure et on reçoit des faveurs comme la guérison : « C’est en donnant qu’on reçoit ».

« La logique mercantile selon laquelle la sphère de la religion opère entraîne, entre autres choses, l’importance accrue des besoins et des désirs des personnes dans la définition des modèles de pratiques et de discours religieux présents sur le marché. En même temps, elle demande aux organisations religieuses une plus grande flexibilité en termes de changement de leurs « produits » pour les adapter de la meilleure manière possible à la satisfaction de la demande religieuse des individus[7].

Parmi les grandes dénominations, c’est l’Assemblée de Dieu qui manifeste le plus grand dynamisme, avec une augmentation relative de 46,3 %, soit une augmentation de 4 millions d’adeptes. Dans le même temps, l’Église Universelle du Règne de Dieu, qui était très engagée en politique, a subi une perte de 11 %, soit 230.000 adeptes.

Dans la Région Nord, les États qui comptent le moins de catholiques sont ceux de la frontière : Rondonia, 47,55 %, Acre 51, 94 %, Roraima 49,14 %. Parallèlement, dans les États du Nord, les pentecôtistes représentent plus de 20 % et 15 % dans les États du Centre-Ouest. Le processus de développement du pays est le fait d’une nombreuse population qui migre du monde rural traditionnel, surtout du Nord-Est, vers les périphéries des métropoles urbaines et les régions pionnières de l’intérieur. Les migrants n’ont rencontré que peu d’appui et de présence de l’Église catholique. Bien différente a été la dynamique de l’Assemblée de Dieu qui ouvre des centres religieux là où s’élèvent les habitations des nouveaux arrivés et instaure une relation de voisinage.

Un « scanner » des dénominations (neo)pentecôtistes.

L’expansion des communautés évangéliques s’est faite en trois grandes vagues[8]. La première commence au début du XXe siècle avec l’arrivée, en provenance des Etats-Unis, de l’Assemblée de Dieu à Belem dans l’État de Para et avec la fondation de la Congrégation chrétienne à Sao Paulo. L’Assemblée de Dieu s’inculture et grandit rapidement, au point que, dans une seconde vague, elle se diversifie dans les années 50 et 60. Toutes ont en commun la libération spirituelle des forces du mal, l’évidence du « soin divin » des blessures de la vie et l’usage de la radio.

Dans une troisième vague, arrive en force l’Église Universelle du Royaume de Dieu qui, outre le culte divin, expose de façon théâtrale des miracles au moyen de rituels marqués par l’émotion et par l’exorcisme, avec un usage intensif des moyens de communication (presse, radio, télévision et, plus récemment, internet). L’argent (dans la corbeille) joue un rôle central pour promouvoir la « Théologie de la prospérité » et garantir une bonne santé physique et financière à ceux qui accomplissent le devoir de la dîme et des autres offrandes obligatoires à Dieu.

La théologie de la prospérité[9] opère et promeut une inversion des valeurs dans le système axiologique pentecôtiste. Jusque-là, traditionnellement, l’Assemblée de Dieu méprisait le monde avec ses tentations et vivait séparée. Avec l’Église Universelle du Royaume de Dieu, la foi en Dieu est, avant tout, l’instrument pour obtenir les biens matériels et le bonheur sur la terre. C’est une vision qui, d’une certaine manière, retourne à une vision de l’Ancien Testament selon laquelle les justes sont bénis par Dieu pendant leur vie. Exprimé en langage moderne, la prospérité devient un droit individuel du chrétien et le malheureux est responsable de son échec à obtenir le bonheur parce qu’il est influencé par le démon.

Le signe d’une nouvelle vague d’ « évangélisation » est perceptible dans le recensement démographique de 2010 : ce sont les 10 millions qui se désaffilient des grands groupes (néo)pentecôtistes, que ce soit pour sortir de toute dénomination, ou pour ouvrir des églises évangéliques de périphérie et non plus des filiales des églises en périphérie. Cette émigration qui préoccupe les pasteurs, suscite leurs recherches pour essayer de freiner cette évasion. Selon le journal O Globo de mars 2017, l’administration fiscale a enregistré entre janvier 2010 et février 2017, 67.951 « entités religieuses ou philosophiques » supplémentaires, soit 25 par jour[10].

Continuité d’une religion populaire ?

Le passage du catholicisme populaire au (néo)pentecôtisme n’est pas tellement une rupture, mais plutôt une certaine continuité. Le répertoire pentecôtiste n’est pas étranger pour le catholicisme populaire : Jésus, l’Esprit Saint, l’enfer, les démons, les miracles, les péchés, les guérisons… Les Églises évangéliques, l’Église Universelle du Règne de Dieu  surtout, reprennent des expériences de la piété populaire.

Dans le cas de l’Église Universelle du Royaume de Dieu, l’adoption de symboles, croyances, pratiques populaires et objets religieux n’est pas irréfléchie. Il s’agit d’une stratégie délibérée de marketing efficient et efficace. « Le manque d’accueil (dans l’Église catholique), joint à la résolution de problèmes sociaux quotidiens, tels que le domaine médico-hospitalier, est aussi un motif de migration en direction des églises néo-pentecôtiste, surtout  l’Église Universelle du Royaume de Dieu »[11].  

Les évangéliques cherchent à être visibles par leurs cultes et prédicationspour occuper les espaces publics et créer une culture publique.

Prosélytisme religieux et projet politique.

L’Assemblée de Dieu, qui vivait en marge du monde et de la société, a décidé, dans les années 90, d’inscrire le prosélytisme religieux dans un projet politique, en lançant ses propres candidats au Congrès. Le but était de défendre la liberté religieuse, de moraliser la politique, de protéger la famille et les valeurs chrétiennes contre des projets de lois qui offensaient la morale et les bonnes coutumes. Cette prédication a conquis un espace permanent dans la politique, comme il est apparu lors des dernières élections de 2018. Il y a une volonté, de non seulement défendre prioritairement les intérêts corporatifs des Églises, mais d’exercer une présence et une influence, respectivement dans les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire.

« Quand il s’agit des votes des évangéliques, nous sommes devant deux intérêts : l’intérêt des chrétiens eux-mêmes à avoir leurs propres représentants et l’intérêt de Dieu pour que son projet de nation se réalise »[12]. Les grands personnages politiques mentionnés dans la Bible, comme Joseph, Moïse, Daniel sont, pour l’« évêque » Edir Macedo, des modèles de leadership pour les évangéliques, puisqu’ils se sont consacrés à la mise en œuvre du projet de peuple de Dieu. « Nous traitons un sujet que peu de lecteurs et d’étudiants de la Bible perçoivent : la politique et le grand projet de pouvoir »[13].

Dans le néo-pentecôtisme, les démons, qui sont très présents dans les prières, sont à l’origine de tous les maux. Dans le domaine religieux, ils démonisent les religions afro-brésiliennes et, dans le champ de la politique, le Parti des Travailleurs, tenu pour responsable de « tout le mal qu’il y a ici ». Lors des dernières élections, il y a eu de l’intolérance et une instrumentalisation du discours religieux pour disqualifier (démoniser) des candidats et invoquer la Parole et le nom de Dieu en vain.

« L’utilisation du discours moral et religieux chrétien pour des objectifs étrangers à l’expérience de la vie, de la mort et de la Résurrection de Jésus de Nazareth n’est pas vraiment une nouveauté dans l’histoire du christianisme. Mais son inversion, avec des appels subliminaux et même explicites aux idoles du pouvoir politique et économique, signifie une inversion du Dieu de miséricorde et de la vie digne pour tout l’homme et tous les hommes, cela est nouveau. Cette inversion est en cours en plein XXIe siècle et représente pour le récit de la foi et principalement sa pratique un danger au moins aussi grave que l’athéisme militant du XXe siècle. Elle manipule, profane et falsifie complètement le Dieu de Jésus de Nazareth, en utilisant son nom pour lui substituer des idoles « au pied d’argile » qui, dans des religions de dénomination chrétienne, ouvrent le chemin au sacrifice des pauvres et à l’indifférence à l’égard de la souffrance du frère. Et comme ce projet idolâtre a besoin de l’État pour se concrétiser, la manipulation du discours religieux à des fins politiques fonctionne comme un piège à loup »[14].

Pour conclure, quelques commentaires pastoraux [15]

Il faut investir dans la fondation de communautés nouvelles et simples avec la création d’un ministère de « fondateurs de communautés », de petites fraternités dans les périphéries des grandes villes et dans les régions rurales de l’intérieur. Les laïcs sont appelés toujours plus à être les protagonistes de la présence de l’Église là où les institutions ecclésiales sont peu présentes ou tout-à-fait absentes. En Amazonie, il y a pas mal de femmes qui assument déjà cette mission qui mériterait d’être davantage reconnue et soutenue, en leur donnant plus de liberté et de responsabilité pastorale et ecclésiale.

La Conférence d’Aparecida a appelé à une conversion pastorale qui exige des changements structuraux. Les Directrices ont affirmé l’urgence de la mise en œuvre d’une Église « communauté des communautés », comme nouveau modèle de paroisse, avec une nouvelle ecclésiologie, dépassant les ritualismes, les sacramentalismes et le cléricalisme.

Les cercles bibliques qui se réunissent autour de la Parole de Dieu, dans leur milieu de vie, sont des ferments de vie évangélique qui évangélisent les familles et les communautés qui, à leur tour, deviennent évangélisatrices, comme le suggère Evangelii nuntiandi. N’est-ce pas ainsi que sont nées les Communautés ecclésiales de base ? « L’assemblée de Puebla a constaté que les petites communautés, surtout les communautés ecclésiales de base, ont permis au peuple d’accéder à une connaissance majeure de la Parole de Dieu, à l’engagement social au nom de l’Évangile, à l’arrivée de nouveaux services pour les laïcs, et à l’éducation de la foi des adultes »[16]. Serait-ce que fait défaut une évaluation plus positive des communautés ecclésiales de base par l’Église institutionnelle ? Dans le contexte de l’Amazonie, ne sont-elles pas appelées à être des foyers de foi et d’évangélisation comme elles le furent reconnues à Medellin ?

Une préoccupation a accompagné pendant des décennies l’Église en Amazonie : c’est la formation de prêtres, peut-être en négligeant la formation d’un laïcat qui soit à la hauteur des défis de la région. Mais il y a eu, dans les dernières années, un effort notable de formation du laïcat et du clergé avec des séminaires d’étude de l’encyclique Laudato si’ du pape François.

Thierry Linard de Guertechin s.j., janvier 2019

A propos de l’auteur : Thierry Linard de Guertechin est jésuite, géographe et démographe. Il est directeur de l’Institut Brésilien de Développement (IBRADES) et du Centre culturel de Brasilia (CBB). Il exerce également une activité de conseiller auprès de la Commission Épiscopale Pastorale pour le service de la charité, de la justice et de la paix de la Conférence Nationale des Évêques du Brésil (CNBB). Il est membre adhérent du Centre Avec.

Notes :

  • [1] MARIANO Ricardo, Analise sociologica do crescimento Pentecostal no Brasil (thèse de doctorat à l’USP, 2001) cité par ANTONAZZI Alberto, Por que o panorama religioso no Brasil mudou tanto ? PAULUS, 2004, p.41 et publié par les Éditions LOYOLA en 2005 sous le titre Néopentocistais : soiologia do novo pentecostalismo.

    [2] Le Padroado(Patronage) était un arrangement complexe de droits et obligations concédés ou formellement imposés par les papes aux souverains de Portugal et d’Espagne pour promouvoir et coordonner l’évangélisation des territoires nouvellement découverts et colonisés.

    [3] Cinquième Conférence générale de l’épiscopat latino-américain et des Caraïbes, Document final (Aparecida, 13-31 mai 2007, § 261 (trad. française : https://www.celam.org/aparecida/Frances.pdf).

    [4] Ibidem, § 259

    [5] Ibidem, § 201

    [6] Le Pape François, Evangelii Gaudium (24 novembre 2013), § 2

    [7] GUERRA L. As influências da logica mercadologica sobre as recentes transfirmações na igreja católica, Revista de Estudos da Religião, São Paulo, 20013, p.1-23, cité dans « Dossiê : Religião e Demografia », HORIZONTE, PUC/BH, v.12, n.36, p.1067, out.dez.2014

    [8] Voir FRESTON Paul, Uma breve história do Pentecostalismo Braslileiro : a Assembléia de Deus, RELIGIÃO e SOCIEDADE, Vol.16, 1994, p.104-129.

    [9] Voir MARIANO Ricardo, Os neopentecostais e a teologia da propospéridade, NOVOS ESTUDOS, N°44, marçode 1996, p24-44, cité par OUALALOU, Lamia, « JÉSUS T’AIME, La déferlante évangélique, chapitre 5 : La théologie de la prospérité, pp.73-80, Cerf, Paris, 2018.

    [10] OUALALOU Lamia, Jésus t’aime !  La déferlante évangélique, Cerf, Paris, 2018, p. 90.

    [11] CERIS (Centro de Estatistica Religiosa et Investigações Sociais), Mudança de religião no Brasil : desvendando sentidos e motivações, 2004, p.65.

    [12] MACEDO Edir, Plano de poder : Deus, os cristãos e a politica, Thomas Nelson Brasil, Rio de Janeiro, 2008, p.123.

    [13] Ibidem, p59.

    [14] « ‘Ementa’ de dialogos em construcao » du 16 février 2019, organisé par l’Observatório de Justiça Socioambiental Luciano Mendes de Almeida (OLMA), Brasilia.

    [15] Voir la 51e Assemblée générale de la CNBB, Aparecida (São Paulo), 10 au 19 avril 2013, Reflexião Pastoral e Analise da situação no Brasil.

    [16] Cinquième Conférence générale de l’épiscopat latino-américain et des Caraïbes, Document final, 178.