Le sourcier de Noël
On dit souvent que pour détecter une eau souterraine, le sourcier utilise son « sixième sens ». Quand sa baguette vibre et s’incurve, quelque chose tire et monte dans ses bras. Une expérience bouleversante : sentir les frissons de l’eau jusque dans ses paumes, comme si les mains avaient soif.
À certains égards, tous nous pouvons être sourciers, à condition d’utiliser notre sixième sens. C’est que chercher une source, c’est d’abord vivre une expérience spirituelle, ce qui suppose une ascèse, un dépouillement. C’est comme rejoindre une crèche en soi et tendre sa baguette vers une prairie intérieure.
Le poète Georges Haldas qui a su évoquer dans son œuvre les eaux les plus souterraines, invite à regarder Jésus comme celui qui ne cesse de chercher un Noël caché au cœur de chaque homme. C’est à cela, dit-il, qu’il invitera ses disciples tout au long du chemin : saisir ce qui peut encore se lever chez quelqu’un, même quand ce quelqu’un est très vieux, ou très blessé, ou très fatigué, ou très rejeté. Que se passe-t-il dans son sous-sol ? Qu’est-ce qui est poreux en lui ? À travers quelles failles l’eau circule-t-elle encore ?
Le sourcier de Noël invite à détecter chez l’autre, en particulier le plus oublié, la source qui murmure en lui. Surtout s’il ne parvient pas à l’entendre ou s’il croit que sa nappe phréatique est épuisée. C’est peut-être cela la « grande joie » annoncée par l’ange : chercher « un grain de blé dans l’eau profonde » dit Haldas. Et sentir le frémissement de l’eau jusque dans ses paumes.