En Question n°124

Néolibéralisme. De quoi parle-t-on?

Ce dossier a été construit sur base des réflexions entamées lors d’une journée d’étude qui a eu lieu à Louvain-la-Neuve le 5 octobre 2017. Cette journée, coordonnée par Saskia Simon, s’intitulait : « Indiscutable ? Et si on en discutait ? Regards critiques sur la politique néolibérale ». Le dossier commence par une introduction de Vincent Delcorps qui permettra au lecteur de comprendre la difficulté à circonscrire le néolibéralisme. Ensuite Cédric Leterme, tout en continuant cet exercice difficile, nous amènera à observer l’impact du néolibéralisme sur les mots utilisés dans la sphère du travail. Suit l’article de Marie Derrider qui montre l’impact, sur le secteur associatif, des dernières réformes pour l’octroi des agréments et subsides de la coopération au développement. Hervé Defalvard nous montre, pour sa part, de quelle manière la question du commun est actuellement évacuée de nombreuses réflexions et pratiques en économie. Pour terminer, Abraham Franssen nous propose de sortir d’une vision manichéenne qui cantonnerait le secteur associatif à de l’alternatif positif et figerait le néolibéralisme en une totalité terrifiante qui engloberait à peu près tout ce qui ne va pas aujourd’hui.

edito

Rêver petit ne sert pas le monde

Emeline De Bouver

S’engager, c’est se projeter vers l’avant. Passer une sorte de contrat avec soi-même, un collectif ou l’humanité en vue de réaliser quelque chose. S’engager, c’est porter ses convictions et les transformer en actions concrètes. C’est aussi orienter son existence, déterminer les valeurs qui nous tirent en avant. S’engager, c’est se mettre en lien avec d’autres, c’est s’unir pour un projet commun.

Pour ceux qui hésitent à mettre un pied dans le large monde de l’engagement – social, écologique, humanitaire… –, s’engager peut apparaitre comme l’apanage d’une catégorie spécifique de personnes : celles qui ont beaucoup d’énergie, qui en savent plus sur le monde que les autres, ou qui font partie de certains réseaux… L’engagement devient alors un monde éloigné de la réalité des gens « normaux ».

Pour ceux qui participent à certaines activités du milieu dit engagé ou militant, une autre question peut se poser : celle de la mesure et de la légitimité. Est-ce que je peux vraiment me dire engagé ? Est-ce que j’en fais assez ? Toujours, on se trouve moins légitime que les VRAIS militants – ceux dont l’action compte réellement. On se sent prétentieux de se dire engagé…

Les défis d’aujourd’hui sont multiples. Et comme le disait Mandela dans son discours inspirant, « jouer petit ne sert pas le monde ». Face à l’énormité des défis actuels, chaque pas compte, chaque transformation de soi, de son association, de son mode de vie, de sa famille compte ; chaque geste pour un monde plus juste, plus écologique, plus solidaire compte. Rien n’est trop petit. Pas parce que cela suffit mais parce que, comme le dit l’adage populaire, « le diable se cache dans les détails ». La transformation de notre société nécessite des actions à tous les niveaux et dans les moindres recoins. Même là où nous pensons qu’aucun levier de changement ne réside. Il est grand temps de concevoir l’engagement comme une réalité plurielle et de cesser de dénigrer ceux qui ne font pas comme nous ou pensent le changement social autrement.

Le « Grand Autre » & le « petit alter » …

Abraham Franssen

Quels sont les impacts et les effets du néolibéralisme sur et pour le secteur associatif ?

<p « >Ainsi formulée, la question pourrait susciter une réponse attendue tant le « néolibéralisme » et l’ « associatif » apparaissent antinomiques. Aux logiques marchandes du premier s’opposent les logiques civiques du second ; à la poursuite du profit financier s’oppose la gratuité du « non profit sector » ; aux normes de compétition et de sélection de l’économie marchande s’opposent les valeurs de solidarité et d’inclusion du non-marchand […]

Discours sur le travail dans le tournant néolibéral

Cédric Leterme

Pour comprendre le « tournant néolibéral », on peut remonter au mouvement d’encastrement progressif qu’a connu le capitalisme à partir de la fin du 19e siècle et dont l’apogée se situe dans les décennies qui suivent la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’avènement du capitalisme a en effet nécessité la destruction des structures féodales au nom d’une conception libérale de l’économie entendue comme une sphère autonome […]

Néolibéralisme et coopération au développement

Marie Deridder

Au cours des six dernières années, la Belgique a réalisé une vaste réforme de sa coopération au développement et des modalités de financement public des ONG. Cet article décrit comment cette réforme a modifié le paysage des ONG et en quoi elle fut un cheval de Troie du néolibéralisme […]

L’indiscutable néolibéral : production d’une économie hors du commun

Hervé Defalvard

Pour comprendre le néolibéralisme aujourd’hui, il est important de marquer une rupture entre le libéralisme des économistes émergeant au XVIIIe siècle et le néolibéralisme de ces derniers depuis le XXe siècle.

Néolibéralisme & perte de sens

Vincent Delcorps

C’est un mot qui ne laisse pas indifférent. Un terme polémique. Repoussoir. Toujours utilisé par les détracteurs de la réalité qu’il entend recouvrir, jamais assumé par ceux qui en appliquent les principes. C’est bien simple : pour les uns, le néolibéralisme est une arme ; pour les autres, c’est un mythe.