« Celui qui se bat peut perdre, celui qui ne se bat pas a déjà perdu »
Berthold Brecht
Le développement, le bien commun et le peuple souverain
Les articles de ce dossier montrent une image effrayante de que ce que l’on dénomme « développement ». Trop souvent, il est vecteur d’appauvrissement, d’inégalités, de déracinement, de déculturation. Les projets mégalomanes de développement en Inde (barrages, usines, autoroutes, mines, …) témoignent d’un mépris profond de l’Etat pour (une partie de) ses citoyens. L’heure est grave, car les conséquences sociales ont le potentiel d’une bombe à retardement. Les tensions ethniques augmentent, les violences se déchainent, le terrorisme fait surface.
Le collectif que nous avons pour habitude d’appeler « l’Etat » semble avoir oublié sa mission première, sa raison d’être : assurer l’Etat de droit, promouvoir l’intérêt général et le bien commun, protéger les minorités, rendre le peuple souverain.
L’Inde a beau être une démocratie vieille de 65 ans, ses pères fondateurs ont beau avoir proclamé un rêve d’une non-violence prophétique, elle est restée en bien des aspects une société de castes où dalits et tribaux ne sont pas des citoyens comme les autres.
Ce dossier nous ouvre les yeux sur une réalité méconnue en Europe : la confiscation des terres des peuples tribaux et des habitants originels pour calmer la faim de développement insatiable de l’Etat indien. Tout cela au nom du bien commun et de l’intérêt général, en faveur de l’éradication de la pauvreté et pour le développement de l’homme. Puissent ces quelques pages nous amener à réfléchir à ce que nous entendons sous ces concepts un tantinet doctrinaux.
Deux pistes de réflexion. Ces notions de bien commun et d’intérêt général nous rappelant le langage de la doctrine sociale de l’Eglise, sommes-nous bien sûrs d’avoir compris ce qu’elles impliquent ? Comment et où rechercher le bien commun de la société ? Comment passer d’une définition théorique ou paternaliste de ces concepts à une pratique inclusive et participative ?
Et puis, quel sens donner aux notions de démocratie ou encore de peuple souverain ? Ne rêvons-nous jamais d’une intégration culturelle où il incomberait aux autres de faire l’effort nécessaire ? Tenons-nous compte des générations futures dans nos choix personnels ou collectifs ? Quelle place donnons-nous à la nature, aux défis climatiques, mais aussi quel regard portons-nous sur la faune et la flore environnantes ?
Les « déplacés internes » et les peuples indigènes en Inde
Le jésuite et sociologue indien Walter Fernandes fait pour nous le tour de la question des déplacements forcés en Inde. Les peuples tribaux et les dalits sont fréquemment victimes d’expropriations par l’Etat indien pour le bien de l’économie indienne, pour son développement ou pour attirer des investissements étrangers[…]
Résistance des peuples en Inde : stratégies, défaites et succès
Le jésuite indien Anthony Dias nous explique comment la politique indienne d’expropriations des terres a fait face à une résistance à l’origine pacifique mais ferme. Ce qui frappe d’emblée est la variété des formes d’opposition et de protestation au pays du Mahatma Gandhi[…]
La « finalité publique » : un sens à retrouver
Au moment de faire mon travail de terrain dans l’Etat du Gujarat, j’ai fréquemment rencontré les tribaux Tadvi. Ceux-ci avaient perdu leurs terres en raison de la construction du barrage gigantesque et controversé du Sardar Sarovar[…]